Paramètres du vol

- Date : 15 février 2003
- Décollage : Mont Gros (Roquebrune)
- Parcours : Distance libre avec 2 points de contournement (Authion, Baou de la Frema)
- Atterrissage : Sospel
- Distance : 76 km
- Durée : 3 h 45
- Vx max : 59 km/h
- Vy max : 6 m/s
- Altitude max : 2614 m
- Parapente : Magus 26 – Mac Para

Quel magnifique début d’année dans le sud-est ! La météo a certainement décidé de se montrer généreuse vis à vis des parapentistes de la région (pourvu que ça dure…) car depuis le mois de janvier, la température est basse (très basse…) et le soleil brille ; il s’ensuit une instabilité remarquable assortie d’une quasi absence de vent météo : le rêve !

Le Mont Gros a donc été le point de départ de quelques vols remarquables à mettre à l’actif de nombreux pilotes locaux (que je ne citerai pas de peur d’en oublier !). Une mention spéciale toutefois à Dominique qui a décidé de mettre à profit ces conditions exceptionnelles pour explorer des axes peu évidents et encore inexploités : bravo à lui ! Les voiles ont donc été nombreuses sur des sommets peu habitués à de telles incursions ; les conditions y étaient pour beaucoup mais aussi le très bon niveau général qui permet aux pilotes de partir en cross dans une région qui, il faut bien le reconnaître, ne s’y prête pas beaucoup (vallées encaissées, urbanisation dense, lignes électriques nombreuses,…).

En ce qui me concerne, la plus belle journée fut sans conteste le samedi 15 février. Ce jour là, en arrivant au décollage avec Marc (Lemoel), Luc et Rémi, je leur lance un peu sous forme de boutade : « aujourd’hui, on va à Auron ! ». Effectivement, Vincent, Dominique, Raymond et Christophe sont déjà très haut au plafond et partent vers le nord ; il ne faut donc pas tarder ! Préparation rapide, décollage à 11 h, attente du cycle et bon petit thermique assez étroit qui me monte, avec Marc, à 1100 m.

Voilà donc les deux Marc qui transitent vers la Cime de Biancon. Arrivés au-dessus de la route qui mène à St-Agnès, on refait le plein pour repartir vers l’ouest. Au Baudon, le thermique de service est là et nous enroulons au-dessus de randonneurs se reposant au sommet. De là, nous voyons très bien nos trois prédécesseurs qui se dirigent vers Sospel (Dominique les a quitté pour partir vers le Mont Férion). Pour nous, la prochaine étape se nomme Mont Méras où un noyau très puissant me propulse à 1900 m en quelques minutes. Pour Marc, c’est un peu plus difficile et il part vers le décollage de La Lavina beaucoup plus bas que moi. Arrivé à la verticale du décollage est de Sospel, vers 1500m, je rejoins Vincent, Christophe et Raymond qui terminent leurs pleins et partent vers le Mangiabo. Je temporise car Marc est encore bas. Nous sommes entre deux cycles et je perds inexorablement de l’altitude en me demandant si je n’aurais pas mieux fait de continuer directement vers le Mangiabo, sans m’arrêter.

Heureusement, je vois Marc se refaire, légèrement sous le vent, devant le décollage. Je le rejoins et c’est reparti ! Direction la crête ouest du Mangiabo qui nous mène sans problème jusqu’au sommet. De petites barbules marquent les thermiques et leurs ombres ne dérivent que très légèrement vers le sud-ouest : nous ne sommes pas contrés et le vol vers La Colmiane est donc tout à fait envisageable ! Nous sommes gelés, le froid a eu raison de Christophe, Vincent et Raymond qui retournent vers le sud ; nous restons seuls, avec Marc, et nous nous engageons sur la crête qui mène à l’Authion. Le lieu est assez austère, très enneigé et de petits thermiques nous permettent de nous maintenir assez haut (entre 2300 et 2600m) pour ne pas trop penser aux conséquences d’un posé en ces lieux inhospitaliers…

A l’Authion, la DCA nous attend et nous faisons le plein sans problème (2541 m pour moi et 2800 m pour Marc qui est arrivé avant moi dans le thermique). La vue est exceptionnelle : Saorge en contrebas, les plus hautes cimes du Mercantour devant nous, la mer derrière et… les skieurs de Turini sous nos pieds ! Nous obliquons vers le nord-ouest, passons au-dessus de la Tête de Ruger (sans rien prendre), continuons vers les plateaux des Terres Rouges où quelques bulles nous maintiennent quelque peu et nous finissons cette très longue transition sous la Cime de Montjoia, dans la forêt.

Je reste dans une combe où des pétards difficiles à enrouler me mènent difficilement jusqu’à la crête. Marc, quant à lui, s’avance plus vers Belvédère… et prend l’ascenseur jusqu’au plafond ! Je quitte donc ma combe turbulente et appelle l’ascenseur moi aussi ; il met du temps à arriver mais une fois dedans, je grimpe à + 6 m/s jusqu’à 2560 m ! (à la mi février…). Marc est déjà sur la Cime de la Palu et je le rejoins sans attendre.

Le thermique est au rendez-vous et me mène au plafond rapidement. Marc est alors sur le Conquet mais à la hauteur à laquelle je suis, je préfère viser directement la Balme en passant au-dessus de la station de la Colmiane (c’est plus direct pour aller à Auron !). En arrivant sur la Balme, je vois malheureusement Marc se poser au stade de football. Je me retrouve donc seul et, tout en enroulant au-dessus de la via ferrata, j’inspecte la suite de l’itinéraire. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle semble très problématique : les plafonds ne sont pas très hauts (pour passer au-dessus du Giraud qui culmine à 2600 m) et, surtout, la neige est très abondante à partir du Col de Veillos. Il semble donc que le passage vers le Mont St-Sauveur soit quelque peu compromis. Cependant, je suis au plafond (2516 m) au-dessus de la Balme et, malgré le froid qui me gèle les mains et les pieds, je n’ai aucune envie de me poser à la Colmiane. Et si je tentais le retour ? Je n’étais pas parti pour faire ce genre de vol mais le passage vers le nord étant bloqué, je ne perds rien à essayer. Et même si je ne me pose qu’à Roquebillière, le retour en stop n’en sera que plus court ! Allez, c’est parti pour la Cime de la Palu !

Retransition. Je tape assez bas mais les faces ouest commencent à donner et je remonte jusqu’à 2244 m, au niveau de la crête. De là, je vise la Crête de Bermonnet qui descend de Montjoia. En cette saison, les brises ne sont pas fortes et je peux me permettre de passer la crête au « radada ». Au sud, je retrouve le même thermique qu’à l’aller mais il me monte moins haut. Qu’à cela ne tienne, j’ai assez de gaz pour passer au-dessus de Belvédère et passer la Crête du Mt Pela. Sur la face sud, je ne prends rien et décide de remonter vers la Tête de Ruger. Sa face ouest devrait donner. Gagné ! Un bon thermique me monte à 2460 m derrière l’Authion. C’est le passage clé du retour : il faut absolument passer la crête qui mène au Col de Turini et qui me barre le passage à 2000 m d’altitude. Je débute donc ma transition en me disant que si ça passe, ce sera limite. Arrivé en milieu de vallée, mon vario commence à biper et je me retrouve dans un bon petit thermique (+ 1 m/s) qui me décale dans la bonne direction ! C’est le pied ! Plus tard, Michel Lacroix me dira qu’il avait trouvé la même ascendance au même endroit un jour où il était allé à La Colmiane en partant de Sospel. C’est bon à savoir… Je passe donc l’Authion et là, les conditions ont changé : les plafonds sont plus bas et la DCA n’a plus de munitions. Que le Mangiabo est loin vu de derrière ! Je m’applique donc à enrouler tout ce que je trouve en visant la face ouest du Mt Ventabren qui est en plein soleil et pratiquement dépourvue de neige.

Comme prévu, je reprends sur cette face mais on est loin des catapultes de l’aller ! Je zone donc là un bon moment avant de trouver un thermique qui me monte assez haut (2200 m) pour envisager le passage sur la face sud du Mangiabo. Je débute donc ma transition, serre les dents (et autres choses aussi…) et passe finalement à 100 m sol, en crabe, dans un vent d’ouest que je rencontre subitement. Le Mangiabo ne donne plus vraiment et je me laisse glisser, toujours en crabe, vers Sospel (à Roquebrune, ils font du soaring sur le Cap-Martin). J’espère, sans trop y croire, raccrocher sur les plateaux derrière le Col de Castillon. Malheureusement, rien, pas une bulle. Je fais donc demi-tour et me pose à Sospel complètement transi après 3 h 45 de vol entre -10 et –20 °C. Je tremble comme une feuille pendant une bonne demi-heure en repliant ma voile. Quelques parapentistes sont là et m’apprennent que les copains qui ont fait demi-tour, le matin, au Mangiabo, n’ont pas pu rentrer sur Roquebrune. Je suis donc un peu moins déçu de n’avoir pas bouclé complètement le retour : aujourd’hui, comme souvent, Sospel était un verrou ! Peut-être qu’une solution existe pour le contourner en empruntant la crête de Peïra-Cava depuis l’Authion… A tester dans le futur !

Par contre, maintenant que je connais un peu mieux la topographie de la région, je pense qu’il y a un superbe triangle FAI à réaliser dans des conditions standards et avec un peu moins de neige. Rendez-vous donc à Sospel au printemps !

Marc

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